Les collèges prouvent leur engagement dans la lutte contre les violences sexuelles

Dans une récente décision d’arbitrage, un collège public a réussi à faire valoir que les violences sexuelles en milieu de travail constituaient un comportement d’une telle gravité que le licenciement était justifié en l’absence de circonstances atténuantes sérieuses.
Les collèges ont toujours confirmé leur engagement en faveur de milieux de travail exempts de harcèlement et de violence en adoptant des politiques, des procédures et des formations de qualité à l’intention de leur personnel et de leurs étudiants et étudiantes. Quelques exemples figurent à la fin de cette étude de cas. Dans le cas présent, les politiques du collège ont été appliquées lorsqu’un membre du personnel de soutien syndiqué a été licencié pour agression sexuelle.
Le collège a reçu une plainte de la part d’un membre du personnel (la « personne plaignante ») affirmant avoir été victime d’une agression sexuelle sur son lieu de travail. La personne plaignante était debout sur une table en train de réparer une clôture lorsqu’un autre membre du personnel (la « personne requérante ») s’est approché, a saisi les fesses et les parties génitales de la personne plaignante, puis a serré ses parties génitales. Cela s’est passé devant un autre membre du personnel qui a été témoin de l’évènement. Le collège a mené une enquête en vertu de ses politiques en matière de violences sexuelles et sexistes et a conclu que l’inconduite avait bel et bien eu lieu. Il a ensuite licencié la personne requérante pour un motif valable.
La personne requérante a déposé un grief par l’intermédiaire de son syndicat, le Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario (SEFPO), qui a nié que la personne requérante ait commis un quelconque acte répréhensible. Le SEFPO a soutenu que la personne plaignante n’était pas digne de confiance et a demandé que la personne requérante réintègre son poste sans aucune mesure disciplinaire ou, à défaut, qu’elle soit condamnée à une peine moins sévère que le licenciement. L’arbitre a rejeté la demande du SEFPO.
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La personne requérante était-elle crédible, ou la personne plaignante et la personne témoin étaient-elles crédibles ?
La position du SEFPO lors de l’arbitrage était que la personne plaignante (la victime de l’agression sexuelle) était « indigne de confiance et peu fiable ». Cela est d’autant plus surprenant que la personne plaignante était elle-même également membre de la même unité de négociation et que le SEFPO a donc remis en question l’intégrité de son propre membre. La personne plaignante s’est montrée émotive durant son témoignage, mais cohérente. Bien que son témoignage ne soit pas sans faille, l’arbitre a conclu que les souvenirs de la personne plaignante devaient être préférés à ceux de la personne requérante. En revanche, l’arbitre a relevé des incohérences centrales et périphériques dans le témoignage de la personne requérante et a conclu que cette dernière n’était pas sincère. L’arbitre a également constaté que la personne témoin de l’évènement avait livré son témoignage « de manière posée et directe » et qu’elle avait été cohérente d’un bout à l’autre de l’affaire. Le témoignage de la personne témoin a appuyé la version des faits de la personne plaignante.
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La personne requérante a-t-elle commis une agression sexuelle ?
La position du SEFPO lors de l’arbitrage était que l’acte physique consistant à toucher et à presser les parties génitales d’une autre personne n’était que du « harcèlement sexuel, pas une agression sexuelle » et que, tout au plus, « l’incident consistait en un bref contact des mains de la personne requérante avec la hanche ou la région de la hanche de la personne plaignante ». Le SEFPO a également soutenu que la conduite ne répondait pas à la norme criminelle de l’agression sexuelle et que, par conséquent, la conduite de la personne requérante ne pouvait pas être considérée comme une agression sexuelle. Le collège a soutenu qu’il s’agissait d’une « agression sexuelle grave », d’un contact qui contrevenait à la fois à la politique du collège sur la violence sexuelle et à celle sur le harcèlement, la discrimination et l’intimidation en milieu de travail.
L’arbitre a conclu que, compte tenu des témoignages plus crédibles et plus fiables de la personne plaignante et de la personne témoin, l’agression s’était produite telle qu’alléguée par le collège. L’arbitre a également conclu que le collège n’avait pas besoin de satisfaire aux exigences de la définition d’agression sexuelle du Code criminel. Il n’avait qu’à démontrer qu’il y avait eu une inconduite en milieu de travail justifiant le licenciement. Il a conclu que les actes de la personne requérante constituaient une « inconduite objectivement grave et flagrante » justifiant le licenciement.
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Si la personne requérante a commis une agression sexuelle, ses longs états de service et l’absence de mesures disciplinaires antérieures à son encontre étaient-ils suffisants pour minimiser l’acte d’agression et justifier l’application d’une peine moins sévère ?
Enfin, le SEFPO a soutenu que s’il était établi que la personne requérante avait commis une agression sexuelle, ses longs états de service et l’absence de mesures disciplinaires antérieures à son encontre signifiaient que l’arbitre devait prononcer une sanction moins sévère que le congédiement. Le collège a reconnu les états de service et l’absence de mesures disciplinaires antérieures à l’encontre de la personne requérante, mais a fait remarquer que la personne requérante n’avait assumé aucune responsabilité, qu’elle avait nié tout acte répréhensible et qu’elle n’avait manifesté aucun remords à l’égard de ses actes. L’arbitre s’est dit d’accord avec le collège et a fait remarquer que plusieurs facteurs devaient être pris en compte, notamment le comportement de la personne requérante, la durée de ses états de service, l’absence de mesures disciplinaires antérieures à son encontre, la reconnaissance d’un acte répréhensible et la preuve de remords ou d’excuses. L’arbitre a conclu que la personne requérante avait accumulé un niveau important de « capital confiance », mais que ce capital avait été réduit à néant lorsqu’elle s’était livrée à des actes de violence sexuelle et qu’elle avait ensuite omis de reconnaitre son inconduite et de présenter des excuses.
L’arbitre s’est également penché sur la jurisprudence invoquée par le SEFPO, selon laquelle des membres du personnel ayant commis des actes de harcèlement sexuel avaient réintégré leur poste. L’arbitre a exprimé des doutes sur le fait que la première affaire, jugée en 1990, aurait le même résultat aujourd’hui. De plus, dans cette affaire, les attouchements n’étaient pas des « attouchements manifestes », alors que la conduite de la personne requérante ici « était sexuellement manifeste et sexuellement offensante ». Dans l’affaire précédente, la personne requérante avait admis sa culpabilité et s’était excusée, ce qui n’est pas le cas ici.
Le licenciement de la personne requérante a été confirmé et le grief a été rejeté. Cette affaire revêt une importance capitale, car elle démontre le sérieux avec lequel les collèges enquêtent et traitent ce genre de plaintes. De plus, elle peut être révélatrice d’un changement dans la manière dont les arbitres et autres paliers de décision tranchent les questions de harcèlement sexuel et d’agression sexuelle en milieu de travail. Notons en particulier la manière dont l’arbitre a indiqué qu’un cas de harcèlement sexuel en 1990 aurait très bien pu être traité différemment aujourd’hui et qu’il a utilisé cette hypothèse pour justifier le rejet de la jurisprudence invoquée par le syndicat.
Les collèges se sont engagés à éradiquer le harcèlement sexuel et les violences sexuelles de leurs campus. Chaque collège de l’Ontario s’est doté d’une politique en matière de harcèlement sexuel et de violences sexuelles au travail et a instauré des programmes de lutte contre le harcèlement sexuel et les violences sexuelles au travail. Par exemple, voici la politique en la matière du collège Mohawk : Politique de respect en milieu de travail (en anglais seulement). Tous les collèges de l’Ontario préparent également des politiques de lutte contre les violences sexuelles afin de protéger les étudiants et étudiantes qui fréquentent leurs établissements et de rendre compte chaque année des aides, des services, des accommodements, des programmes et initiatives de sensibilisation et d’éducation, des incidents et des plaintes, ainsi que de la mise en œuvre et de l’efficacité de leurs politiques. Par exemple, voici le Rapport annuel sur le harcèlement sexuel et les violences sexuelles (en anglais seulement) du collège George Brown, qui comprend des statistiques sur le harcèlement sexuel et les violences sexuelles en milieu de travail. Apprenez-en également davantage sur le sujet grâce au document Le consentement, c’est la clé (en anglais seulement) du collège Niagara.